Nous revoilà sur les chemins et aléas de la vie, à la rencontre des héroïnes du quotidien, qui mobilisent toute leur énergie pour concrétiser leurs projets. La semaine dernière, je t’ai expliqué comment j’entends l’entrepreneuriat au sens large, c’est-à-dire le fait d’entreprendre un projet, et que l’investissement associatif est une forme d’entrepreneuriat.
Cette semaine, je souhaite poursuivre sur ce ton et cette analyse, et te présenter le parcours et l’engagement de Marie-Claude, qui, non seulement dirige sa propre officine de pharmacie, mais en outre, s’investit dans une cause caritative majeure, qui gagne à être connue. J’ai d’ailleurs rencontré Marie-Claude dans un cercle associatif, puisque nous sommes toutes les deux membres actives de la délégation locale des Femmes Chefs d’Entreprises, dont l’objectif est de promouvoir la prise de responsabilités des femmes à des postes et fonctions de direction, le tout dans un cadre solidaire et bienveillant, fondé sur le partage d’expériences. Vaste sujet, auquel nous sommes donc toutes deux très sensibles !
Je te laisse découvrir Marie-Claude et son engagement !
Marie-Claude Santini : Présentation
Présente-toi : dis-nous qui tu es, d’où tu viens et ce que tu fais ?
Je suis Marie-Claude SANTINI, docteure en pharmacie, installée à SAINT CYPRIEN, où je suis titulaire d’une officine depuis 35 ans à présent. Je suis également membres du groupement de pharmacies Pharmavie, depuis environ 24 ans.
J’ai plusieurs casquettes, puisque depuis une quinzaine d’années, je siège aussi au conseil d’administration du groupement Pharmavie, mais surtout, je suis présidente bénévole de l’Association Pharmavie depuis environ 6 ans.
Présente-nous ton univers : en quoi consiste ton projet à ce jour ?
J’ai plusieurs casquettes, donc je suis sur bien des projets !
En ce qui concerne mon officine, depuis maintenant 35 ans, je tends à développer des services, et un accompagnement complet du patient. Je suis passionnée par mon métier, j’aime mon métier, j’aime conseiller, j’aime aider, j’aime soigner… Cela fait partie de moi ! Avec mon équipe, nous avons mis en place des services innovants d’accompagnement. Notre métier est également en pleine évolution depuis le COVID, avec de nouvelles missions aujourd’hui, telles que les vaccinations et tests à grande échelle, auxquels nous n’étions pas confrontés auparavant.
En ce qui concerne l’Association Pharmavie, c’est un projet qui me tient particulièrement à cœur, par mon métier de pharmacienne, mais aussi par ma propre sensibilité. Cette association se mobilise pour le bien-être des enfants hospitalisés, notamment par l’initiative de L’HÔPITAL DE MON DOUDOU.
L’HÔPITAL DE MON DOUDOU, c’est une aire de jeux de dédramatisation, qui est installée dans les services pédiatriques d’hôpitaux, avec pour mascotte la peluche TOUDOU. C’est d’ailleurs une peluche que j’ai dessinée, je suis la “maman TOUDOU”, et c’est tout un symbole pour moi !
Cette peluche TOUDOU est aujourd’hui donnée à chaque enfant qui entre dans un HÔPITAL DE MON DOUDOU : c’est vraiment un compagnon rassurant, apaisant, un compagnon de galère ! Le personnel soignant l’utilise pour mimer les soins médicaux sur ce petit compagnon.
Aussi, depuis 2021 nous accompagnons les enfants en oncopédiatrie. Alors j’ai aussi créé SUPER TOUDOU, avec de supers pouvoirs, pour accompagner les petits patients qui se battent contre le cancer. L’objectif est de les mettre en confiance avec les soins médicaux et les appareils sur lesquels ils sont pris en charge, comme le linac en radiothérapie. Nous avons d’ailleurs modélisé cette machine, à l’échelle de TOUDOU et de l’enfant, au Centre de lutte contre le cancer Gustave Roussy.
Ce concept a été créé par le groupement Pharmavie, en 2014-2015, et a vu le jour à Cannes, en concertation avec la protection civile locale. Donc quand j’ai créé TOUDOU, avec son pansement sur le front, son T-shirt trop court et son nombril à l’air, pour aider le personnel soignant à expliquer ce qui allait se passer, le souhait était de rendre l’hôpital plus doux pour les enfants.
Que fais-tu dans la vie en parallèle de ton projet ?
Je suis donc pharmacienne, à la tête d’une officine de 19 salariés, et nous essayons d’exercer notre métier le mieux du monde, d’encadrer et de soutenir tous nos patients.
Quel a été l’élément déclencheur à ce projet ?
L’élément déclencheur, c’est justement cette belle idée de départ, rendre l’hôpital plus doux pour les enfants ! C’est sûr que quand je le raconte aujourd’hui, presque 10 ans après sa création, 12 HÔPITAUX DE MON DOUDOU en activité plus tard, 2 en cours d’installation en oncopédiatrie, et un carnet de rendez-vous plein jusqu’en 2025, c’est “waouh”… !
Mais si tu regardes plus en détail, finalement, quand les planètes s’alignent, les choses se mettent en place assez naturellement. Quand tu as un rêve, un projet, et que tu te donnes les moyens d’y arriver, la vie place sur ta route les bonnes personnes, les bonnes opportunités, pour accomplir ce que tu dois accomplir.
L’Association Pharmavie a 40 ans aujourd’hui. Lorsque j’ai pris la présidence de cette association, il y avait l’envie de porter un projet qui nous est propre, et tout est parti de là : la suggestion d’une action dans les hôpitaux, destinée aux enfants, pour dédramatiser l’acte de soin et rendre l’hôpital plus doux ! Aujourd’hui, quand je vois le chemin parcouru… Les choses se sont réalisées, et c’est merveilleux !
Donc si je reprends bien, il y a le RÉSEAU PHARMAVIE et l’ASSOCIATION PHARMAVIE, qui sont deux choses distinctes ?
Tout à fait, le réseau est l’entité professionnelle, un groupement de pharmaciens, avec toutes les implications logistiques et de regroupement – tels que des outils quotidiens pour gérer les officines -, à l’instar de n’importe quel autre réseau professionnel. L’association est totalement distincte, avec un projet caritatif et humanitaire, pour s’impliquer et soutenir des causes et actions de bienfaisance.
L’Association Pharmavie est effectivement l’association émanant du groupement Pharmavie. Elle existe depuis 40 ans, et nous y avons toujours soutenu des causes, dédiées à l’accompagnent ou la santé des enfants, comme La Chaîne de l’Espoir – fondée par Alain Deloche et dont Mireille Darc était la marraine -, mais aussi Enfance et Partage, Perce-Neiges ou plus récemment Princesse Margot…
Les premiers soutiens de l’association, ce sont les adhérents du groupement Pharmavie, avec la mise en place d’une cotisation annuelle obligatoire. Le caritatif est donc depuis toujours très ancré dans nos gênes !
Cela a permis de dégager des fonds pour l’association, et de mener des actions concrètes, et ce premier projet pilote de L’HÔPITAL DE MON DOUDOU à Cannes, pour aujourd’hui arriver à près de 15 structures montées et financées. Et on ne va pas s’arrêter là ! En parallèle nous vivons également grâce à des mécènes ou des donations, qui sont des soutiens très précieux.
Ce projet était-il évident pour toi ?
Un véritable alignement des planètes, une parfaite évidence ! Ça s’est fait comme ça ! C’est vrai que quand on me demande de l’expliquer, comme tu le fais, ça parait fou : il y avait ce projet, ce rêve, et la vie t’envoie dans ta trajectoire toutes les personnes et les aides possibles, tous les soutiens, et voilà !
Bien évidemment, il faut savoir s’entourer de bonnes et de belles personnes, avec les compétences et les connaissances te permettant de développer tes projets.
La force du réseau Pharmavie est importante aussi. Cette association est vraiment un plus aujourd’hui, car nous sommes non seulement des acteurs de santé, mais aussi des acteurs de santé sociale et solidaire, qui permet cette contribution à notre société.
Comment se matérialise le projet l’HÔPITAL DE MON DOUDOU ?
En premier lieu, il y a un travail collaboratif avec les équipes du service pédiatrique d’un hôpital donné, pour voir où nous pouvons nous positionner pour les aider et les accompagner, afin d’accueillir l’enfant et dédramatiser l’acte de soins. Ensuite, on signe des conventions avec les services pédiatriques des hôpitaux, pour 3 ans, renouvelable. Depuis la création du concept, toutes les conventions ont été renouvelées, et c’est devenu un outil de travail indispensable pour les hôpitaux.
Il faut savoir qu’en moyenne, l’installation d’un HÔPITAL DE MON DOUDOU coûte 35 000 € hors taxes et que 2 000 TOUDOU sont livrés chaque mois. Concrètement, cela représente une enveloppe moyenne de 60 000 € pour trois ans, par hôpital équipé. Donc ce n’est pas rien ! Aussi, depuis 2015 ce sont 100 000 petits patients ont déjà été accompagnés par doudou TOUDOU.
Nous avons d’autres fondations et associations qui nous soutiennent, mais nous sommes toujours en quête de financeurs pour continuer à développer nos actions, et installer d’autres dispositifs sur tout le territoire. Je voudrais avoir un maillage territorial de L’HÔPITAL DE MON DOUDOU équilibré, c’est le prochain objectif.
J’imagine qu’il y a une infrastructure dédiée à cette association ?
Le groupement Pharmavie, c’est une chose, et l’Association Pharmavie est totalement indépendante de celui-ci. Je suis présidente de l’association, et nous avons un bureau, constitué d’un trésorier, d’une secrétaire et de membres pharmaciens, à l’instar de ce que l’on retrouve dans n’importe quelle association. J’ai également la possibilité de compter sur une chargée de projets associatifs et de la communication, Alix Achard, et nous travaillons ensemble sur les projets.
Nous sommes donc complètement indépendants du groupement PharmaVie, cependant nous sollicitons nos pharmaciens adhérents dans la valorisation de leur association. Nous leurs demandons notamment au sein du réseau Pharmavie, de proposer à la vente dans leurs officines, une gamme de produits solidaires TOUDOU (gel douche bébé, lingettes bébé … ) et les peluches TOUDOU, dont une partie des recettes servent à financer les actions de l’association.
Nous poursuivons aussi d’autres actions caritatives, comme le financement d’un centre pédiatrique de chirurgie cardiaque à Bamako, dans le cadre de notre partenariat avec l’association La Chaîne de l’Espoir, ou encore la fabrication de tee-shirts Prati’Got, conçu par Princesse Margot, adaptés aux soins et bien-être des patients.
Marie-Claude Santini : Inspirations
Il y a beaucoup de causes à défendre et à soutenir, mais finalement, votre association s’investit surtout pour l’enfance et les soins pédiatriques ?
Oui, principalement. Bien que parfois, au gré des rencontres et des objectifs, il peut y avoir des évolutions. Par exemple, nous avons un projet de TOUDOU BIKER avec la protection judiciaire de la jeunesse, qui va s’adresser aux adolescents en réinsertion.
Il se concrétisera cet automne, avec l’idée de réinsérer des jeunes sur des métiers du digital et du numérique, en leur faisant travailler à la création d’un dessin animé sur TOUDOU, et des supports annexes. Le court-métrage servira dans les HÔPITAUX DE MON DOUDOU, pour que les soignants puissent présenter aux jeunes patients le processus de soin. Il y a donc le souhait d’accompagner ces adolescents vers un métier, mais aussi de leur transmettre cette envie d’aider et ces valeurs d’altruisme. Et la cerise sur le gâteau, ce sera un baptême de moto avec TOUDOU BIKER !
D’ailleurs il n’est pas rare que les patients ados nous réclament aussi leur TOUDOU, et nous sommes ravis d’augmenter les ravitaillements de doudous !
TOUDOU est aussi utilisé par les pompiers par exemple, pour permettre aux enfants de s’exprimer afin dénoncer des agissements troubles ou des zones douloureuses.
C’est vraiment un objet transitionnel d’importance, à tout âge !
Quelle a été ta plus grosse erreur dans la conduite de ce projet ?
Il n’y a pas d’erreur en réalité ! Les échecs, les erreurs, sont là pour nous donner des leçons, et nous permettre d’en tirer des enseignements. Dans mon caractère, il n’y a pas d’erreur, je transforme ces faits en quelque chose de positif pour avancer. Tu apprends de tes erreurs, et je suis quelqu’un de très déterminé et optimiste !
A contrario, quelle a été ta plus grande réussite ?
Tu m’aurais posé cette question il y a quelques années, je t’aurais dit que c’était la première installation de l’HÔPITAL DE MON DOUDOU, parce que ce n’était pas évident. Mais finalement, de continuer à en installer, ce n’était pas évident non plus ! Aujourd’hui, c’est plus fluide et plus facile, parce que nous avons suffisamment de recul, et de preuves sur les bienfaits de cette action.
Pour répondre, je dirai donc que c’est la reconnaissance des bienfaits de TOUDOU, et la reconnaissance des équipes soignantes, qui me disent “aujourd’hui on ne peut plus s’en passer” ! Tous les services ont renouvelé la convention !
TOUDOU rend l’hôpital plus doux, et nous avons une publication scientifique en ce sens, avec une étude démontrant que le stress du patient a diminué de 25 %, on sédate moins pour les IRM… Il y a une véritable intégration dans le protocole de soin, avec des bienfaits reconnus. Ces soins si pénibles et difficiles, tant pour les professionnels, les jeunes patients, et leurs parents, et la dédramatisation que permet TOUDOU… c’est ça la réussite, c’est cette reconnaissance !
Qu’est-ce qui a été le plus difficile à concilier ? Le temps, non ?!
Le temps effectivement… Mon activité de pharmacienne, la présidence de l’association, ma vie personnelle également, tout cela est très riche ! En plus, depuis près de 2 ans, je suis montée de grade, puisque je suis grand-mère de jumeaux, Agathe et Hugo. Tout cela me porte finalement ! Le fait d’avoir deux petits-enfants aujourd’hui, donne encore plus de sens pour moi à L’HÔPITAL DE MON DOUDOU, et mon envie de m’investir auprès des jeunes enfants.
Qu’as-tu gagné à mener ce projet ?
La quête de sens dans mes actions au quotidien. Comme je te le disais à l’instant, en plus d’être un acteur de santé – ce n’est pas seulement un métier mais une véritable passion pour moi -, je me veux être un acteur de santé sociale et solidaire.
J’aime être un maillon utile de cette chaîne humaine, qui contribue à rendre ce monde meilleur. Il en découle une certaine fierté. J’ai au fond de moi cette passion qui me motive, et qui donne aujourd’hui du sens à mes actions, et qui me pousse à pouvoir les réaliser. De savoir aujourd’hui qu’elle est ma mission sur cette Terre, cela me comble, et me procure un certain épanouissement.
Es-tu à “ta” place ?!
Oui, je pense que je suis à ma place, effectivement. Nous avons tous des gens autour de nous qui aimeraient réaliser des choses, et qui ne savent par quel bout commencer, qui n’osent pas… Et moi, j’ai vraiment le sentiment d’être à ma place. Cela me procure beaucoup de bonheur, de joie, et de gratitude aussi. Le sourire d’un enfant, ça n’a pas de prix, et j’aime reprendre cette phrase de Mireille Darc, qui disait “sauver un enfant, c’est sauver le monde” !
Où te vois-tu dans 10 ans ?
J’ai beaucoup d’ambitions ! J’ai un objectif, c’est de créer la fondation L’HÔPITAL DE MON DOUDOU, d’en être la présidente, avec des rêves nationaux et internationaux !
Quelle est ton héroïne dans l’Histoire, et pourquoi ?
Des héroïnes, j’en ai beaucoup, tant dans la réalité que dans la fiction !
En quelques mots, je dirai que j’ai d’abord ma maman, qui a été pour moi un modèle et une de mes sources d’inspirations. Ensuite, j’ai Simone Veil, qui a combattu et qui a mené des actions auprès des femmes, qui ont beaucoup de sens pour moi. Elle a toujours été très inspirante pour moi.
Quelle faute t’inspire le plus d’indulgence ?
Il m’est arrivé de pardonner l’impardonnable dans certaines situations, tel que le vol. Il existe des contextes et situations où j’ai pardonné. J’ai pardonné, mais je n’ai pas oublié. Voler pour voler, je n’accepte pas, mais dans ce contexte précis, j’ai pardonné.
As-tu un mantra / une devise / un dicton / une citation qui te motive ou qui te guide ?
J’en ai plusieurs en réalité, car mon papa m’a bercé avec de multiples phrases du genre ! Il y en a une qui m’a beaucoup servi dans la vie : Il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des solutions, et le jour où il n’y a pas de solutions, c’est que le problème c’est toi ! Dans des moments “down” de ma vie, ce mantra m’a vraiment beaucoup aidé, et m’a permis de revêtir ma tenue de guerrière !
Quelle est LA chanson qui te motive quand tu as le moral dans les chaussettes ?
J’adore la musique, je joue du piano, je pratique la danse, donc j’en ai beaucoup ! Mais s’il faut t’en donner qu’une, je dirai Gloria Gaynor “I will survive” !
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Je pense qu’avec l’exemple de Marie-Claude, la phrase de Winston Churchill prend tout son sens « Nous gagnons notre vie par ce qui nous rapporte, mais nous façonnons notre vie parce que nous donnons » !
Non lucratif ne veut donc pas dire dénué de sens, bien au contraire ! Tu as parfois une vie professionnelle complexe, et l’investissement associatif est une totale contribution à ton épanouissement, mais renforcera aussi tes compétences, ta créativité, et ton apport au monde. En cette période de rentrée et de renouveau, profites-en pour t’investir dans une association !
Si tu veux en savoir plus sur les actions de l’Association Pharmavie, rendez-vous sur leur site Internet, et si tu veux contacter Marie-Claude, rendez-vous sur sa page LinkedIn.
Enjoy !