Aussi longtemps que je me souvienne, le sujet de la contraception m’a été inculqué. J’ai le souvenir de questionner mes parents (enfin ma mère, mon père avait toujours un truc urgent à faire dès que nous posions des questions sur le sexe !), d’avoir des ateliers de prévention au collège/ lycée, et même la réalisation d’un exposé avec ma copine Cyrielle en 3ème, pour notre cours de biologie, sur les différents moyens de contraception existants sur le marché en 2002 ! Lorsque j’ai démarré ma vie sexuelle, j’étais parée à toute éventualité, zéro malentendus possibles !
Peu avant mes 17 ans, j’ai ainsi gobé pour la première fois ce merveilleux mini-cachet, que tant de nos mères, tantes, grands-mères, ont lutté pour obtenir. Je crois me souvenir d’une certaine fierté en recevant la prescription de la pilule pour la première fois, j’avais l’impression de participer à l’émancipation de la Femme avec un grand F, de disposer pleinement de ma liberté, de mon corps et de ma vie sexuelle, d’entrer dans l’âge adulte. Bref, j’ai gobé ma première pilule en me sentant invincible !
Et puis, tel un vieux couple, Pilule et moi avons connu des hauts et des bas… D’abord elle m’a filé pas mal de bricoles cette coquine, tels que des saignements intempestifs, des boutons, du gras sur le derrière (et rien sur la poitrine, ce n’est pas du tout ce que l’on m’avait vendu !). Et puis, j’ai commencé à entendre de plus en plus de trucs louche sur elle : malaises douteux, thromboses, risques accrus de cancer, de maladies cardiovasculaires… Bref, je commençais à avoir un goût de féminisme amer en bouche, et j’étais de moins en moins convaincu de mon duo avec ma copine Pilule !
C’est là où ça m’a frappé : la contraception reste une affaire de bonnes femmes ! Bah oui, souviens-toi, mon exposé en 3ème, je suis trop calée sur les autres possibilités disponibles ! Et bien finalement, dans la TRES GRANDE majorité, la contraception dite « réversible » est uniquement destinée aux femmes (pilule, stérilet, implant…). Et je ne te parle pas de la contraception dite irréversible, la stérilisation, qui dans nos pays latins est un sujet quasi-tabou ! Bref, je t’embarque avec moi dans mon débat du jour.
Contraception et charge mentale
Lorsque j’ai commencé à travailler en résidence senior, une de mes résidentes, Mme P., mère de 5 enfants, à raison d’un par an durant ses 5 premières années de mariage, m’a dit un jour « le jour de l’arrivée de la pilule, ce fut ma libération » ! Elle a même ajouté « j’ai souhaité mes deux premiers enfants, et subi les trois suivants » ! J’étais alors scandalisée, du haut de mes 23 ans à ce moment-là, j’étais tellement loin de me douter des enjeux de l’époque, pour moi qui avais la chance de pouvoir choisir « le bon moment » pour avoir un enfant. Tu te rends compte, dans les années 1960, grosse pression sociale pour te marier à peine sortie de l’œuf, mais en plus, juste après la découverte de « ta vie d’adulte », tu pouvais potentiellement te retrouver mère de famille nombreuse en deux temps et trois mouvements ! Je n’ai compris que plus tard le sens des paroles de Mme P.
Car oui, la pilule, ce fut une révolution : du sexe sans fertilité, de quoi secouer dans les chaumières ! Fini la méthode Ogino foireuse, les erreurs de calcul lunaire, et comptes à rebours angoissant avant les prochaines règles. Et je ne te parle même pas de l’impact de la religion, on parle tout de même d’une époque où le prénom « Marie » était number one dans les cours de récréation ! Bref, la pilule, elle était attendue de pied ferme par ces dames !
La charge mentale de la contraception était ainsi une affaire exclusivement féminine : ce sont aux femmes auxquelles on inculquait un semblant d’éducation sexuelle, et dans le meilleur des cas, l’explication du cycle menstruel et méthodes pour limiter la fertilité (ou tout au moins pour ne pas copuler aux périodes critiques du mois). Dans le pire des cas, ce sont aussi elles qui devaient se débrouiller pour faire disparaître l’incident, à une époque où l’avortement était considéré comme un assassinat !
Nous avons fait du chemin depuis, mais la charge mentale de la contraception reste, il me semble, une affaire féminine. Je prends mon exemple personnel : si je ne gobe pas religieusement mon cachet tous les soirs, Monsieur ne s’inquiète pas de ce qu’il en est !
Contraception et effets secondaires
La pilule était donc révolutionnaire dans les années 1950/1960, mais depuis, on en est un peu revenu. Comme tout médicament, la pilule contraceptive peut avoir des effets secondaires. Les effets indésirables les plus courants comprennent les nausées, les saignements irréguliers, la baisse de libido, la prise de poids, les maux de tête et les changements d’humeur. Des effets plus graves sont aussi répertoriés, comme je te l’ai évoqué en intro.
Reste donc la possibilité de revenir aux contraceptions locales, type préservatif, sans effet secondaires notoires a priori, ou d’aller plus loin, avec l’implant ou le stérilet. Mais il y a toujours cette possibilité d’effets indésirables (j’ai personnellement subi une grosse prise de poids importante avec l’implant) !
Autrement dit, les dispositifs de contraception existants ne sont pas 100 % safe pour nous mesdames ! C’est quand même dingue, nous sommes pourtant deux dans une relation sexuelle, et au-delà de la charge mentale, la charge “hormonale”, elle pèse aussi essentiellement (pour ne pas dire totalement) sur les femmes.
Et je ne te parle même pas de la stérilisation féminine : bien que la loi ait largement évolué là-dessus, c’est un projet qui reste assez fermé. Je suis moi-même décidée à ne plus avoir d’enfant, et lorsque j’en ai parlé à ma gynécologue, elle n’a certes pas tenté de me convaincre d’abandonner mon projet, mais elle a tout de même glissé les effets secondaires possibles d’une anesthésie générale, d’un suivi post-op, ou encore, et je cite, “d’une intervention chirurgicale non-nécessaire”. Alors oui, elle est dans son rôle de médecin, j’en conviens, mais lorsque tu consultes l’anesthésiste pour la péridurale à quelques semaines de ton accouchement, et qu’il te fait signer sur un coin de table 2 pages recto/verso de décharge de responsabilité en cas de pépin, bizarrement, personne ne t’alerte de manière solennelle sur les effets secondaires de cette anesthésie !
Une femme qui a envie de choisir la voie de la stérilisation, n’a pas à en être dissuadée ou effrayée. Il y a un délai légal de réflexion de 4 mois, il faudrait que les médecins donnent des informations sans orientation, ou alors, qu’ils donnent les mêmes informations dramatiques pour tous les types d’intervention !
Il n’y a pas longtemps, j’ai vu passer un billet d’humour sur les réseaux sociaux, c’était du genre : la femme est féconde 4 jours par mois et l’homme 365 jours par an… pourtant ce sont les femmes qui ont la charge de la contraception du couple. C’était un trait d’humour assez criant, et tellement réaliste ! On se fait ch**r la vie pour 4 maudits jours de fertilité dans le mois !
Contraception et implication masculine
Tiens, l’implication des hommes, parlons-en ! Alors oui, je salue les initiatives des slips chauffants et autre mouvement contraceptif du genre, c’est un bon début, et cela démontre que, heureusement, certains hommes décident de s’emparer du sujet, ouf !
Mais concernant le développement de la pilule contraceptive masculine, tu veux une bonne blague ? Sais-tu pourquoi les développements n’avancent pas trop ? Parce que les premiers essais sur l’hormone de testostérone ont démontré des effets secondaires potentiels, tels que la prise de poids, la dépression, ou encore l’augmentation des taux de cholestérol… Pauvres choux, pas de pilule pour hommes parce qu’il y a des effets secondaires… ça fait juste 60 ans que nous, les femmes, nous gavons d’hormones pour que nos œufs ne soient pas fécondés, avec tous les effets indésirables recensés ! Mais bon, tu comprendras bien qu’avec une population de chercheurs masculinisée +++, on n’est pas sortie de l’auberge de sitôt !
Il y a aussi des solutions plus radicales, comme la vasectomie. Il faut savoir que dans les pays anglo-saxons, ce type d’intervention est bien plus fréquente que dans nos pays latins. En France, toucher au sacro-saint pénis semble être une hérésie !
D’après mes recherches, la stérilisation chez une femme demande en général, une intervention de 30 minutes à une heure, une journée d’hospitalisation en ambulatoire, un arrêt de travail de 8 jours, et tout un suivi post-op classique. La stérilisation chez un homme consiste en une intervention réalisée sous anesthésie (locale ou générale), qui dure entre 10 et 30 minutes, nécessite un arrêt de travail de 1 à 2 jours, et ne demande même pas de suivi particulier après (hormis une limitation des efforts physiques). Bref, tu fais ça un vendredi, et tu retournes frais et dispo au boulot le lundi, ni vu, ni connu ! Là encore, si tu fais le comparatif entre les deux procédures, l’une est plus invasive que l’autre, mais pourtant, la moins invasive fait le plus peur à ces messieurs ! Et l’une doit coûter bien plus cher à la sécu que l’autre !
Quand un homme ne veut plus d’enfants, et qu’il le revendique haut et fort, ce serait bien qu’il prenne ses propres responsabilités, et assume ses décisions, plutôt que de se reposer sur sa partenaire pour la contraception. J’ai dans mon entourage direct, pas moins de 5 hommes qui avouent ne plus vouloir d’enfants : ils refusent tout bonnement d’entendre parler de vasectomie ! Il serait temps que de vraies campagnes de communication soient menées sur le sujet.
Globalement donc, l’implication des hommes dans la contraception en est à ses balbutiements, du moins de mon point de vue ! Et je t’invite vivement à me contredire si tu penses que j’y vais trop fort !
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Bien, tu l’auras compris, sur le sujet de la contraception, j’en ai gros !
Je trouve cela tellement dingue, en 2023, que la recherche médicale n’ait pas plus avancée, à l’heure où on te parle de régulation des naissances, de trop plein d’habitants sur Terre, d’effets secondaires notoires de certains contraceptifs, ou encore d’égalité femmes/hommes. Comment peut-on être à égalité entre les sexes, si les dés sont pipés sur tous les plans !
Messieurs, si vous lisez cet article, méditez sur la charge mentale et hormonale que vous nous imposez ! “Un enfant quand je veux” oui, mais un partage de la charge contraceptive, ce serait bien aussi.
Enjoy !
2 Responses
Tu as raison sur toute la ligne, par contre je pense que la femme n est pas obligé de faire ce qu elle fait. Nous avons toujours le choix,18 ans sans pilule et une charge partagée par le couple c est possible aussi, on peut réinventer sa sexualité
J’ai encore du boulot sur le chemin 😉
Merci pour ton témoignage !