La date de publication de ce billet m’est plutôt symbolique : c’est un jour d’anniversaire pour bien des personnes autour de moi ! Certaines n’ont fait que passer dans ma vie, d’autres m’ont fait vivre un gros ascenseur émotionnel, et certaines ont compté plus que d’autres… Dont ma grand-mère, qui n’est plus de ce monde, mais en prenant de l’âge je (re)découvre sa vie, et les difficultés qu’elle a pu rencontrer en son temps. Je me suis donc dit que ce serait un bon clin d’œil de parler de violences faites aux femmes pour toutes ces raisons, spécialement en ce jour.
Un bon anniversaire aux natifs du 22 janvier, sans oublier une bonne fête à mon petit frère !
Ces derniers mois, en dehors de ma vie chaotique et de mes introspections personnelles, crise de milieu de vie oblige, j’ai aussi été bouleversée par le triste anniversaire du décès de Marie Trintignant et la série Icon of a French cinema de Judith Godrèche. En effet, pour la première, j’ai été troublée de constater qu’il y a 20 ans, au décès de Marie sous les coups de son compagnon, les médias parlaient tous de « crime passionnel »… Et pour la seconde – d’ailleurs si tu n’as pas regardé la série, vas-y ! -, j’ai tout autant été bousculée par la relation d’une jeune fille de 16 ans avec un réalisateur de 40 ans, au vu et au su de tout le monde, au cœur des années 1980, sans que personne ne trouve rien à redire… Et puis, maintenant que j’ai une fille à élever dans ce monde de brutes, il y a des choses qui m’hérissent encore plus le pelage !
Et donc, me voilà avec mes gros sabots, mes interrogations, et mon envie de te les partager !
Les violences faites aux femmes : de quoi parle-t-on exactement ?
Alors oui, commençons par le commencement, qu’est-ce donc que cette notion de « violences faites aux femmes » ? Cette réflexion peut paraître idiote, mais en toute franchise, peux-tu, spontanément, donner une définition claire de cette notion ? Moi non, je ne le pouvais pas avant de préparer ce billet, du moins, ma définition était très confuse… Sur le principe, j’avais tendance à dire que c’était des violences subies par les femmes en raison de leur sexe et de leur genre, que c’est le fait d’être une femme qui te rend victime de ces violences… Bah une fois que tu as dit ça, ce n’est pas nécessairement plus clair ! Et puis, cette violence n’est pas que physique non plus… Bref, c’est plus complexe qu’il n’y parait.
D’une manière très concrète, après avoir bossé mon sujet, je dirais que les violences faites aux femmes peuvent être physiques, sexuelles, émotionnelles ou économiques :
- Les agressions physiques comprennent les actes de violence physique directe, tels que les coups, les violences sexuelles et les agressions sexuelles. C’est spontanément ce à quoi tu penses quand on te parle de violences faites aux femmes, à la femme battue, à la femme violée…
- La violence émotionnelle peut prendre la forme de manipulation psychologique, d’intimidation, de harcèlement verbal ou de contrôle excessif. C’est ce à quoi tu peux éventuellement penser en second, si tu as eu une relation borderline, voire toxique dans le passée, où que tu en as été témoin. Et puis, les téléfilms de l’après-midi nous en servent aussi pas mal, le mâle pervers narcissique fait recette dans les scénarios ! La femme sous emprise, la femme dont le conjoint est tellement jaloux qu’il en est possessif, la femme verbalement malmenée, la femme harcelée, la femme en relation love bombing… C’est une violence sournoise et invisible, qui peut aller jusqu’à la manipulation mentale.
- La violence économique implique le contrôle ou la privation financière, limitant ainsi l’autonomie des femmes. C’est la version insidieuse des violences, le conjoint qui impose un contrôle budgétaire, refuse certains achats nécessaires pour le foyer, confiscation des revenus… C’est une façon d’asservir la femme, en la rendant dépendante économiquement.
Je précise ici que je parle avec mon prisme de femme hétérosexuelle, mes phrasés sont tournés autour d’une relation homme-femme, mais ce n’est pas la seule réalité ! Ce peut-être aussi une relation père-fille, employeur-salariée, etc. La violence et le vice humain n’ont hélas aucunes limites !
L’aspect essentiel des violences faites aux femmes à retenir est le caractère sexiste : la violence qui découle des inégalités de genre profondément enracinées. Les normes sociales discriminatoires et les stéréotypes de genre contribuent à perpétuer les attitudes et les comportements préjudiciables envers les femmes. Ces formes de violence ne se limitent pas à un contexte culturel ou géographique particulier, mais transcendent les frontières, touchant donc des femmes de toutes les classes sociales et de tous les milieux.
Les conséquences sont graves et étendues. Outre les traumatismes physiques et émotionnels immédiats, les victimes peuvent subir des dommages à long terme, y compris des problèmes de santé mentale, des troubles de stress post-traumatique, des difficultés économiques et des obstacles à l’éducation et à la carrière… Les causes sont complexes et multifactorielles, et ce n’est pas l’objet de ce billet aujourd’hui !
En définitive ces violences sont ainsi subies par les femmes parce que considérée comme plus faibles, en raison des normes sociales et stéréotypes en place, mais aussi et surtout parce que les femmes sont éduquées à subir, et les hommes éduqués à dominer. En gros !
Pour compléter sur le sujet, parce que parler des violences pour les éradiquer est un enjeu sociétal et de santé publique, un outil pédagogique existe, le violentomètre des violences faites aux femmes :
Les violences faites aux femmes : une lente évolution dans le traitement médiatique
Donc, tu l’auras compris, la lutte contre les violences faites aux femmes nécessite une approche holistique, c’est à dire globale. Les efforts doivent s’étendre à la sensibilisation du public, à l’éducation, à la réforme juridique, à l’autonomisation économique des femmes, à la création de réseaux de soutien et à la promotion d’une culture de l’égalité des sexes… Et là-dedans, le rôle des médias est crucial !
Le traitement médiatique de ces violences est rythmé par une très (trop) lente évolution. Je te le disais en préambule : il y a 20 ans, je m’en souviens parfaitement, lorsque Marie Trintignant est morte, à la suite des coups assénés par son compagnon Bertrand Cantat, les médias parlaient tous, je dis bien TOUS, de « crime passionnel ». L’amour rend tellement fou qu’il tue ! Cette seule expression est dingue ! Marie Trintignant serait morte parce que son amoureux a été tellement emporté par la passion, qu’il en a perdu la raison, et lui a ôté la vie ! A l’époque, du haut de mes 16 ans, même moi je savais que ce qu’il avait fait, ça s’appelait un meurtre, et que ça n’avait rien à voir avec de l’amour ! Je n’ai plus jamais pu écouter un morceau de Noir Désir sans penser à Marie Trintignant, et en avoir un retour au fond du ventre.
Egalement, et c’est aussi la genèse de cet article, lorsque j’ai visionné la série de Judith Godrèche, outre l’autodérision et le second degré décapant de la femme en pleine crise existentielle de milieu de vie (coucou moi !), j’ai été frappée par l’histoire de sa jeunesse, de cette gamine mineure qui vivait avec son amant de plus de 40 ans, sans que cela ne soit remis en cause par qui que ce soit. Et cette relation avait commencé lorsqu’elle avait elle-même 14 ans ! Quand j’y pense, à 14 ans, ma mère me disait souvent, « quand on t’appuie sur le nez, il y encore le lait qui sort », ça me mettait dans une rage folle, mais elle avait tellement raison (oui maman, je l’écris noir sur blanc, tu avais raison ! Cadeau !) ! Pour préparer ce billet, j’ai fait quelques recherches sur le web, et je n’ai rien trouvé d’offusquant sur cette relation, hormis les récentes interviews de l’actrice y revenant, qu’elle qualifie elle-même aujourd’hui de relation d’emprise.
Et puis, dans notre actualité, tu as aussi tout le traitement médiatique autour de Gérard Depardieu ou Patrick Poivre d’Arvor, pour ne nommer qu’eux. Alors, je ne fais le procès de personne ici, entendons nous bien, mais au-delà du fond détestable (à vomir même !) et de la forme « matraquage », je vois un progrès sur ces sujets : aujourd’hui, on en parle, on en débat, on commence à s’accorder sur le fait qu’il ne faut pas séparer l’homme de l’artiste (coucou la masculinité toxique !)… A mon sens, la présomption d’innocence n’implique pas d’ignorer les faits en question (coucou Monsieur le Président, Michel D et tous les autres !).
Hier, ces violences étaient banales, dans le meilleur des cas, elles s’expliquaient par la passion, aujourd’hui, elle ne doivent plus être tues. Rappelons qu’en France, seules 12 % des victimes de viol ou tentative de viol portent plainte, et que seulement 1 % des plaintes aboutissent à une condamnation judiciaire, et ce n’est pas parce qu’il y a 99 % d’innocents… De quoi décourager de parler !
Les violences faites aux femmes : comment sont-elles traitées dans les médias de nos jour ?
Aujourd’hui, on en parle ! Alors oui, selon l’auteur des faits, parfois un peu trop, j’en conviens, nos émissions médias et chaines d’infos en continue courent tellement après les annonceurs qu’elles nous font du sensationnalisme à audimat. Mais je préfère voir le verre à moitié plein qu’à moitié vide : l’affaire Harvey Weinstein, a été le point de départ d’une certaine libération de la parole sur la scène médiatique. Le fait que des femmes « puissantes », des femmes avec une certaine notoriété, osent prendre la parole, se présenter en tant que victime de violences, encourage les femmes lambdas, comme toi et moi, à dire STOP à leur tour.
Cela a aussi permis aux pouvoirs publics de s’emparer de ces sujets, à en faire des axes de travail prioritaires, à mettre en place des financements, des formations, des évolutions dans les pratiques internes de bien des structures et institutions. Les comportements changent ainsi petit à petit, bien que tout n’aille pas aussi vite que sur le canal n°15 ou 16 de la TNT… En Espagne par exemple, les actions engagées (et les moyens, pas loin de 1 milliards d’euros débloqués en 5 ans !) ont permis de significativement diminuer ces violences dans le pays. Oui je ne te parlerai pas de la France, j’essaie encore de me remettre du réarmement démographique !
Les médias ne taisent plus ces affaires de violences faites aux femmes, et emploient les bons mots surtout. L’expression « crime passionnel » semble bannie, on parle d’homicide lorsqu’une femme meurt sous les coups de son compagnon, voire même de « féminicide ». Je suis malgré tout dubitative sur cette dernière formule, cela me paraît incohérent de réclamer un traitement égalitaire et de vouloir avoir son propre qualificatif. Un être humain qui tue un autre être humain, c’est un homicide. Je pense qu’il faut cesser de tout sectoriser à outrance, et en revenir aux fondamentaux, les violences, quelles qu’elles soient, sont inadmissibles, les auteurs doivent en être punis, les victimes protégées, et toute notre société doit progresser dans le bon sens pour les bannir. POINT !
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Est-ce parce que j’ai décidé d’être plus optimiste cette année que je vois que le traitement médiatique des violences faites aux femmes progresser dans le bon sens ? Possible ! En définitive, on en parlait peu dans le passé, ou alors on ne s’en offusquait pas, et maintenant on en parle et on les condamne de plus en plus. Pour preuve, souviens toi, cette vidéo de l’INA qui a inondé les réseaux récemment, elle est dingue de nos jours !
Le curseur de la normalité a évolué, et sur ce point, c’est tant mieux.
Enjoy !